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Le CPE est un contrat équilibré, riche en oméga3

dimanche 12 mars 2006, par lesmiettes


Le nouvel ordre social prend soin de nous, pauvres ignorants du CAC 40.
Le CPE : une entrée privilégiée dans le monde du travail. Le nouveau modèle social est un club privé. C’est un privilège d’avoir un travail merdique, parce que l’assistanat, la solidarité, les dépenses sociales abusives, qui ne servent pas le patronat, pèsent sur l’enjeu économique de la France. Et le premier ministre et le gouvernement entendent bien “mener une action durable et approfondie pour concilier la nécessaire sécurisation des salariés avec la recherche de la compétitivité et le renforcement de notre économie “. Ça , c’est de la lutte contre la précarité !

En tapant “Manif du 7 février 2006″ sur le net, voila-ti pas qu’apparaît en liens commerciaux « Emploi des jeunes, Non au chômage, Oui au CPE : signez la pétition » !
Un spécialiste s’exprime en faveur du CPE en s’auto-interviewant de lui-même, de son plein gré :
Première question : Le gouvernement a décidé d’agir pour lutter contre le chômage des jeunes, le CPE est-il selon-vous, la réponse que la jeunesse attendait ?
« Agir pour lutter contre » ?! Deux verbes, rien que ça !
Et pourquoi pas simplement dire : le gouvernement a décidé de lutter contre le chômage ou… d’agir contre le chômage. Eh non ! Parce que cela signifierait qu’il n’y fait rien jusqu’à présent. Et comme le révèle la réponse qui suit : « le chômage est un problème complexe qui ne peut se régler d’un coup de baguette magique. On aurait réglé le problème depuis trente ans ». Et hop, voila un coup de baguette magique pour dégager en deux phrases le problème complexe qu’est le chômage dans la trappe-à-oubliettes, et faire place au CPE qui, lui, est doté de tous les pouvoirs pour faire courir les entreprises avec “des semelles de vent” et non pas avec des “semelles de plomb” (dixit P. de Villiers). Mais pour les jeunes ?…
« Le CPE n’est pas la réponse miracle, mais permet une entrée privilégiée dans le monde du travail. […] le CPE est un vrai contrat de travail […] avec un vrai salaire […] qui donne lieu à une activité professionnelle à part entière, [et il] répond à une réelle attente de la jeunesse ».
Ouais, surtout il répond à une réelle attente du patronat !
C’est bien pour cela que l’organisation patronale “Croissance plus” et la confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) ont salué la mise en place d’un nouveau contrat de travail pour les jeunes. Pour “Croissance plus”, la création du CPE permet une « double avancée » en « contribuant à lutter contre le chômage endémique qui touche les jeunes » et « à adapter le Code du travail aux règles économiques qui gouvernent les entreprises ».
Josselin de Rohan, président du groupe UMP au sénat : « la réforme globale du contrat de travail, la réforme du financement de la Sécurité Sociale, celle du régime des heures supplémentaires, démontrent que le premier ministre et le gouvernement entendent mener une action durable et approfondie pour permettre à la France de concilier la nécessaire sécurisation des salariés avec la recherche de la compétitivité et le renforcement de notre économie ».
C’est ça, il faut surtout bien les tenir en main, les salariés. Maîtriser, sécuriser la vanne de la “trappe-précarité” pour alimenter les entreprises et le MÉDEF. « Puisqu’assouplir le droit du travail est aujourd’hui un objectif vital pour le pays… L’enjeu est tout simplement d’adapter notre modèle social aux réalités ».
La “trappe-à-précarité” est un immense réservoir humain, corvéable, maniable, influençable, jetable, manipulable à souhait pour la classe dominante. « Adapter, le modèle social aux réalités », ça fait rêver. La voilà, la réelle attente de la jeunesse : s’adapter aux règles économiques qui gouvernent et pourrissent nos vies, le monde, la planète entière.
Quand on pense « qu’une minorité d’activistes de gauche et d’extrême-gauche se sont lancés dans une vaste campagne de désinformation et de diabolisation ». Et qu’ils font rien qu’à mettre des bâtons dans les roues de la croissance.
« L’argument de la précarité est d’une hypocrisie sans nom ».
« Il faut faire confiance au gouvernement… On n’a pas le droit de mentir à la jeunesse ».
Ben, tiens !
C’est ce qu’on appelle un contrat équilibré : plus de “souplesse”, de richesses, de rentabilité et de pouvoir aux employeurs et à la classe dominante et pour les jeunes (et tous les autres aussi) de “nouvelles garanties” parce que le monde, le modèle social dans lequel ils vivaient, n’existe plus.
À l’heure où le désespoir pousse des précaires à des gestes de révoltes, de colère, de folie (suicides, violences au sein même des familles…), ils subissent la répression, les contrôles, les menaces, les radiations, les sanctions, les inculpations arbitraires, la violence, les humiliations, les maladies de misère (mauvaises conditions de vie, pénibilité du travail, mauvaise alimentation, dépression, manque de soins et d’écoutes…).
À l’heure où la réaction légitime de contestation, de colère, de révolte est punie pour outrages et rébellion, ou autres variantes genre menaces, de nombreuses victimes du nouvel ordre social finissent en prison où ils pourront toujours travailler pour l’objectif vital de la France à un juste prix, ou mourir dans l’ombre et le silence de cet enfer sans nom.
Et ils voudraient nous faire croire à leur lutte contre la précarité. Alors qu’il est bien évident que l’objectif vital, l’enjeu pour la France est l’économie, d’où “l’assouplissement” des droits et la destruction du Code du travail. Les droits fondamentaux nuisent à l’économie.
Les droits fondamentaux, les nuisances à l’économie, c’est nous ! Les semelles de plomb des entreprises, les poids morts qui empêchent la croissance de croître, c’est nous ! Les parasites, les feignasses, les fraudeurs, la racaille, c’est encore nous !
Le nouveau modèle social va mettre de l’ordre dans tout ça.
Serions-nous assez forts, assez solidaires, assez nombreux pour résister à la destruction de nos libertés, de nos droits, de nos choix de vie… ?
Un monde meilleur est possible. Faisons en sorte qu’il commence à se réaliser maintenant ! Parce que demain, il sera trop tard ! Et qu’on est déjà demain ! Précaires, salariés, chômeurs, retraités, RMistes, radiés, déprimés, dépressifs, rêveurs… Nous sommes nombreux, nous savons qu’en agissant ensemble nous sommes forts et qu’ensemble la vie ne nous fait plus peur !
Tant de souffrances, de détresses humaines, de désillusions, de solitudes, de désespoirs qui perdurent… Il suffirait de si peu pour y croire, pour enfin vivre mieux. Ça serait quand même beaucoup plus crédible que l’euro-millions, et on y gagnerait tous !
Descendons tous dans la rue pour libérer nos vies du joug des dominants qui veulent nous faire prendre des vessies pour des lanternes ! Contre le CPE, le CNE, contre les nouvelles mesures de contrôle des chômeurs, des RMIstes, contre toutes menaces, intimidations, radiations ! Contre le nouvel ordre social qu’on veut nous imposer !
Nous sommes tous concernés.
Tous ensemble, redonnons des couleurs et de l’espoir à l’histoire de nos vies et de la dignité pour tous. Retrouvons-nous fraternellement car nous pensons que le bien-être de chacun est le bien-être de tous. Car un monde injuste n’est pas une fatalité et qu’au lieu de se faire un ulcère tout seul chez soi, vaut mieux crier sa colère, ses espoirs, revendiquer ses droits dans la rue tous ensemble.
Venez donc essayer cette nouvelle thérapie de groupe qui vous fera le plus grand bien. Rejoignez les résistants au nouvel ordre social. Ne nous laissons pas berner, exploiter, recrachons la pilule qu’on veut nous faire avaler.
Toi qui entends, quelque part, l’avenir de tous est entre tes mains. Car si on n’a pas le choix de dire NON, une vie d’esclave serait mieux que quoi ? La prison, l’hôpital, l’asile psychiatrique, être à la rue… ?
Une vie d’esclave, c’est mieux que rien ? Mais c’est déjà rien, une vie d’esclave !

Une précaire réfractaire.

Une goutte d’eau pour déborder le vase.
Un grain de sable pour enrayer la machine infernale broyeuse de vies.

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